Controverse # Draco M.

Tout en tournant la page, April entendait les derniers crépitements des braises mortes dans l'âtre de cheminé aux gravures compliquées. La chaleur douceâtre embaumait la pièce, et ce n'était pourtant pas faute de l'aérer bon nombre de fois durant la journée. Sous terre, les cachots étaient humides, par extension donc, propices à la moisissure. Amalgamé aux relents de cendres et de fumée, l'atmosphère aurait très bien pu paraître désagréable pour quelqu'un qui n'en avait pas l'habitude. Malgré ça, la salle commune des Serpentards avait quelque chose de chaleureux. Les pierres froides, tapissées d'un velours d'argent et de vert, les fauteuils de cuir -même si la jeune fille les trouvait décidément trop rêches - la table de verre, les lampes rondes aux lueurs verdâtres, suspendues aux chaînes de métal brute. C'était peut-être, en fin de compte, seulement confortable pour les serpents.
Assise en tailleur, les genoux contres les deux accoudoirs, April ne quittait plus des yeux les lignes noires sur leur papier délicat. Être la première dans tout, c'était ce à quoi elle s'évertuait depuis la rentrée. Les Sortilèges, la Métamorphose, l'Art de la Magie Noire, les Potions. Même la botanique avait le droit à son heure d'étude. La patience du Serpentard s'était accrue au fil des années passées dans l'enceinte du château. Il ne lui était pas impossible, donc, de passer des heures à s'assommer de connaissances. Elle négligeait même son sommeil au profit de sa réussite. Ce n'était pas unvéritable problème, d'ailleurs, puisque même en temps normal, April ne dormait que trop peu. Et cela lui était amplement suffisant, d'ailleurs. En étudiant ainsi, sans prendre en compte les heures sacrifiées qu'elle aurait pu passer à flâner avec d'autres camarades, la Vert et Argent espérait - plus qu'une esperance, enfaîte, c'était une certitude - les résultats adéquats à tout le travail qu'elle avait fourni. Oh bien sûre, ce n'était pas comme si elle le faisait totalement pour elle. Agissant de la sorte, April se doutait bien d'attiser l'exaspération et la jalousie de quelques-uns quant à ses notes, flattant ainsi son hégémonie, et un sourire oblique se peignait sur ses lèvres.

Il était près d'une heure du matin, à en juger par le tic tac incessant de sa montre. Depuis vingt et une heure, April s'était installée sur le fauteuil -celui qui était dos à la cheminée - et était restée devant son manuel avancé des potions, levant quelquefois le regard lorsqu'on la saluait avant d'aller se coucher. La Serpentard avait vu la salle commune se vider peu à peu de ses élèves, et elle était presque sûre que certain manquaient à l'appel. Les préfets, bien entendu, qui pendant leur ronde employaient quelques salles du château à leur convenance, pour autant qu'elles soient studieuses. D'autres encore qui avaient le goût de la prohibition, et, par conséquent, préféraient visiter le château lorsque celui-ci était plongé dans la pénombre. Les balades nocturnes n'étant franchement pas au goût du jour pour Stanford, elle préfèrait attendre le sommeil bien au chaud dans les cachots. Pas qu'elle n'était pas téméraire, seulement, tant qu'elle n'avait pas atteint l'objectif qu'elle s'était donnée, April ne pouvait pas se permettre de s'adonner à autre chose. Et puis, même s'il avait une autre allure la nuit, Poudlard restait Poudlard.

Ses doigts effleurèrent la page, qui se tourna derechef. Le sujet sur la goutte du Mort-Vivant était traité une page et demie, dont un paragraphe entier insistait sur les composants bien précis et surtout pas approximatif, qui dans ce cas, se révèlerait dangereux. April plissa le nez. Il y avait une différence assez succincte entre passer l'arme à gauche et s'endormir pour l'éternité. Mais en soi, le résultat était presque le même. Se désintéressant donc de la potion, la jeune fille referma les paupières, et écouta. Le flux sanguin qui irradiait contre ses tempes, les derniers sursauts du feu éteint, son souffle lent et régulier. En dépit de son insatisfaction, elle se laissait couler dans une drôle de torpeur. Mais, dans cette parenthèse de chaleur entre une atmosphère pesante, un bruit de fond désagréable redressa April d'un bond. Des pas feutrés à travers l'épais mur de pierre, la brune tourna instinctivement son regard vers la lourde porte, qui, pas même quelques secondes plus tard, s'ouvrait dans un grincement désagréable.
Elle ne s'étonna presque pas de voir qui se tenait dans l'embrasure de la salle. L'allure tragique, un dédain au charme douloureux, ce visage blême et froid, glacé même, Draco Malfoy était là, au beau milieu de la nuit, sa baguette au creux de sa main anguleuse. Pendant quelques instants, April le regarda, l'air légèrement hébété, puis, s'enfonçant de nouveau dans le fauteuil, elle trancha le silence d'une voix légèrement caustique :

« - Malfoy ? Je pensais que tu étais déjà au creux de tes draps »

Elle tourna son visage vers lui, lui offrant un sourire mièvre. Décidément, le prince de Serpentard avait bel et bien perdu de sa superbe. En vérité, Draco ne ressemblait maintenant plus qu'à un mannequin à l'expression altruiste, ampoulée et déchirante. Un masque grotesque. Pire que ça, il semblait s'être plongé dans un cimetière d'infortune. Il était devenu misérable, malgré tout, il veillait à ne rien laisser paraître. C'était passablement idiot, d'ailleurs, parce qu'il n'en devenait que plus ridicule. Dans un élan intrinsèque, April se redressa, referma son livre qu'elle posa avec précaution sur la table basse, déplia ses jambes, et posa un de ses bras sur l'accoudoir, se penchant légèrement en avant.

« - Par Salazar, est-ce que tu t'es regardé ? »

Elle pouffa doucement, dévorant d'un regard interessé l'héritier des Malfoy. Il était maquillé comme un triste clown, de fatigue et d'affliction consumée. S'il y avait un sentiment qu'elle pouvait avoir pour lui désormais, c'était bien la pitié.

« -Tes prétendantes ne font pas assez bien leur travaille. Ou trop bien, justement. Regarde moi ça, t'as l'air d'un chiffon. Tu devrais te ménager plus que ça. »

Siffla t'elle. Ce n'était par animosité, car après tout, April n'avait rien contre lui. Mieux, elle l'appreciait particulièrement. A sa manière.

Lettre horriblement sèche de son père concernant son adhésion forcée à la Pure Blood Crew. Cours de Potions. Cours d'Enchantements. Haricots verts. Cours de métamorphose. Entraînement de Quidditch épuisant. Et, enfin, scène de Pansy.

Draco Malfoy venait de vivre une nouvelle journée épuisante. Bien entendu, c'était l'apanage de tous les adolescents qui peuplaient le château, et davantage encore les enfants de moldus ou les Sang-mêlés qui craignaient pour leurs fesses à cause des évènements récents ; Draco Malfoy, lui, n'était pas un vulgaire fils de moldus. En revanche, il subissait la pression de son père et des autres mangemorts qui semblaient jouir rien qu'à l'idée de le voir rater ses futures missions. Enfin, non. S'il ratait encore une mission, son père lui filerait sûrement la correction de sa vie, en avant-goût de celle que lui donnerait le grand Manitou lui-même.

Blaise était son meilleur ami, et si Draco devenait illogique en repoussant le peu de gens qui comptaient pour lui alors qu'il ne s'était jamais senti aussi seul, il n'avait pas pu résister cette fois à sa demande. "Bouge-toi le cul." En gros, c'était ça. Il avait passé deux heures à faire des tours de terrain et à réaprivoiser cet art qu'est le vol et qu'il avait délaissé ces derniers mois, sous le regard attentif du garçon à la peau sombre. Blaise Zabini n'en avait peut-être pas l'air, mais il s'inquiétait des traces que les évènements laissaient de manière frappante sur son blond de copain. Implicitement, Draco ne lui en était que plus reconnaissant.

Ce fut hélas le seul petit éclair sympathique de la journée, parce qu'à peine Malfoy avait-il réinvesti la salle commune dans l'intention d'aller prendre une bonne douche que Pansy Parkinson lui avait sauté dessus, enfonçant son index dans sa poitrine à la manière d'un personnage de dessin animé énnervé. Elle était énnervée, d'ailleurs, cela se voyait parfaitement. Pour un peu on aurait pu sincèrement attendre que de la bave se mette à couler sur ses lèvres à la manière d'un chien enragé, tant elle tempêta contre lui. A travers toutes ses plaintes il cru deviner une révélation de Svetlana Bukovski, qui lui aurait apparement révélé qu'il avait passé l'heure du déjeuner à lui faire des avances parfaitement explicites en leur genre. C'était faux. Malfoy était de toute façon trop déprimé pour faire des avance à qui que ce soit, et surtout pas à la Russe qui passait son temps à le faire tourner en bourrique. Encore une mauvaise blague de son invention, à n'en pas douter.

"Lâches-moi." avait-il répondu simplement d'une voix morne avant que ses tympans ne crient grâce, et il s'était dignement dirigé vers la salle de bain sans un regard en arrière. Toutes ces petites histoires stupides lui passaient largement au-dessus de la tête, désormais. Comme si tout cela faisait partie d'un autre univers. Comme si, à cause de tout ce qui lui arrivait, il n'était plus capable de s'intéresser à autre-chose qu'à lui-même. Bien sûr c'était déjà le cas auparavent, mais le phénomène s'accentuait dangereusement. Il préférait d'ailleurs croire que c'était son instinc de survie conservateur qui menait la barre.

Dans le vague espoir de se détendre, il avait passé la soirée seul la salle sur demande. Ses précédents investigations lui avaient permit d'en connaître l'accessibilité comme sa poche, et cette fois, elle avait prit une apparence plutôt chaleureuse. Une grande cheminée garnie d'un bon feu, un fauteuil haut à accoudoirs de cuir et, surtout personne pour lui taper sur le système. Draco devenait aussi asocial et fermé qu'une huître. Il avait fixé le feu pendant de longues heures, pensif, réfléchissant à sa mission. Détruire les enfants de moldus.. Cette fois, pourtant, il n'était pas seul pour exécuter ce travail ingrat. Il avait eut le droit généreux de réunir une armée miniature qui n'acceptait que le Pur du pur. Un véritable agrégat suintant de prétention et d'ambition, à vomir. La plupart de ces imbéciles avait l'air de considérer cela comme un jeu. Sauf Blaise et Pansy, qui faisaient ça pour être à ses côtés. Si l'on mettait de côté l'hystérie de la jeune femme, elle pouvait en fait se révéler être une alliée très fidèle.

Sortant finalement de sa torpeur en clignant des yeux, Draco remarqua seulement que la nuit était tombée. Il devait être tard. Il avait sommeil, et l'image de son lit imprimée dans sa tête pris un aspect particulièrement attirant. Quittant donc la Salle sur Demande, le Serpentard illumina les couloirs vides de sa baguette pour decendre les huit étages qui le séparaient de son dortoir, dans lequel il ne s'attendait à trouver personne. A part peut-être Pansy, qui n'était pas encore venue s'excuser.

Mais non, pas de trace d'elle. Après avoir murmuré un "Nox" d'une voix brisée de ne pas avoir parlé depuis des heures, Draco remarqua seulement la présence d'April Stanford, tranquillement assise dans un fauteuil à le regarder. Elle le héla d'ailleurs en prétendant avoir cru qu'il serait déjà couché à une heure pareil, enchaînement cependant la seconde suivante sur son physique. Du moins, on apparence actuelle. Draco savait pour se regarder à outrance dans tous les miroirs qu'il croisait depuis qu'il avait l'âge de marcher qu'il avait été plutôt gâté par la nature, bien que dans son esprit tout cela soit pourtant parfaitement normal. Il était exceptionnel, il avait un physique exceptionnel, point barre. Il y prêtait d'ailleurs un soin tout particulier, en restant notamment très attaché à son hygiène en toute circonstances. Les cernes apparues sous ses yeux depuis l'an passé n'avaient jamais voulu s'effacer depuis, et le blond assimilait ça à sa propre perdition. Si même son apparence commençait à se dégrader, c'était que sa vie, et surtout la vivre, devenait vraiment délicat.

Ce n'était pas pour autant qu'il jugeait légitime de devoir supporter de telles remarques. Surtout venant d'April. Allez savoir pourquoi, ces derniers temps son activité favorite semblait être celle de le critiquer ouvertement, comme s'il avait besoin de ça, tiens.

"Tes prétendantes ne font pas assez bien leur travaille. Ou trop bien, justement. Regarde moi ça, t'as l'air d'un chiffon. Tu devrais te ménager plus que ça." renchérit-elle pourtant la seconde suivante, comme si elle lsiait dans ses pensées. Ce qui était impossible, parce qu'il était Occlumens. Elle devait juste être naturellement chiante dans ce cas.

"Je dois prendre ça comme une avance ? Tu te proposes ?" railla-t-il donc avec mauvaise humeur en rangeant sa baguette dans sa poche et en faisant quelques pas dans la salle commune, constatant qu'elle était entièrement vide si l'on exceptait la jeune femme et lui.

"Mais pour pratiquer efficacement une fellation, il faut savoir se taire. Je doute que tu sois la mieux placée pour occuper ce poste, avec toutes les remarques stupides que tu débites à la minute." ajouta-t-il, volontairement acide, en lui jetant un regard atrocement condescendant. On ne cherche pas à provoquer l'héritier Malfoy. On craint l'héritier Malfoy. Et, si l'on ne le craint pas, on ferme quand même sa gueule s'il n'en décide pas autrement.

Après un soupire et quelques battements de cils, April accrocha le regard du garçon devant elle. Un sourire oblique sur les lèvres, la Serpentard s'attardait sur les traits de Draco, contraste de noir et de blanc sans aucun éclat de couleur. L'arrête de son nez, les courbes de ses lèvres pincées de contrariété, sa peau frémissante, son regard lourd d'un vide dérangeant. Enfaîte, elle n'aurait sû dire s'il exprimait une avidité particulière ou, au contraire, s'il souffrait d'une terrible affliction qui semblait le malmener. Si elle constatait ça avec un sourire particulièrement acéré, elle ne put s'empêcher de constater que, merde, il devait sacrément en avoir à découdre en ce moment. Observant d'un oeil morgue les cents pas que son vis à vis faisait, April se redressa sur son fauteuil, cala son dos contre le siège de cuir trop rêche, replaça une mèche de cheveux derrière son épaule et s'autorisa un léger ricanement. Ne répondant pas tout de suite à la réplique du blond, elle leva les yeux au ciel, humecta ses lèvres, se demandant également quelle conclusion aurait ses élucubrations.

Ce n'est pas que Draco était repoussant - loin de là, enfaîte. Mais il y avait dans son allure une telle prépondérance qu'April n'avait jamais trouvé un intérêt autre que platonique pour l'héritier Malfoy. D'abord, il était si chauviniste que ça la foutait mal à l'aise. Ensuite, sa tête était fourrée d'idées toutes plus saugrenues et ridicules les unes que les autres. Si April ne roulait pas sur l'or, elle avait le mérite de dire que, elle, au moins, elle pensait sans avoir à se soucier de l'avis de papa ou maman - surtout papa, sans aucun doute. Et, pour finir, il avait bien trop de greluches à ses pieds, et Poudlard, s'il avait été quelque peu dépeuplé durant l'été, n'abritait pas qu'un seul mâle dans son enceinte, aussi April ne prêtait qu'un intérêt que très bref au petit prince. Leur rapport se limitait à des signes de tête, quelques moqueries de la part de la jeune femme, et ça s'arrêtait là. Autant dire qu'ils ne se connaissaient ni d'Eve ni d'Adam, et la Vert et Argent n'en avait rien à foutre. Ou si peu. Parce que, malgré tout, rare étaient les personnes qui devaient connaitre véritablement Draco Malfoy. April ne doutait pas qu'il restait un petit con imbu de lui-même -merci pour lui - mais il y avait très certainement des sentiments subreptices derrière son masque grotesque et arrogant.Sans le quitter des yeux, elle avait pris un air on ne peut plus sérieux, sans se soucier de le dévisager avec insistance. Raclement de gorge. De nouveau, un soupire, puis :

« - Pourquoi pas ? Mais... »

Elle sourie vaguement. Après un bref haussement d'épaules, elle reprit :

« - Je laisse la tâche ingrate aux grogniasses qui te servent de putains.»

Amusée, ses doigts tapotèrent l'accoudoir avec empressement. La joute verbale avait réveillé son cerveau en convalescence à la recherche d'un sommeil réparateur. Passant sa main dans ses cheveux avec nonchalance, elle fixait maintenant le blond d'un regard étrange.

« - Quant aux remarques stupides... »

Elle renifla, savourant les secondes qui s'egrainaient. April aimait bien laisser l'instant peser le poids de ses mots.

« - Avoues qu'elles t'ont froissé. Ça voudrait dire que ce ne sont pas totalement des conneries. Ça m'étonnerait pas que tu sois mal baisé, de toute façon. »

Avec un sourire entendu, la Serpentard se releva avec paresse du fauteuil dans lequel elle était assise depuis plus de quatre heures. Une grimace de douleur orna un instant son visage, mais elle reprit très vite contenance, s'avançant à pas mesurer du type qui faisait bien une tête de plus qu'elle. Comme il mettait de côté l'éthique, April concevait tout à fait qu'il n'aurait aucun regret à lui en coller une si elle titillait un peu trop son orgueil princier. Mais ce n'était pas de sa faute s'il avait une tête à claque, aussi elle osa se rapprocher, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus que quelques centimètres les séparants.

S'il y avait bien une chose qui pouvait encore étonner Draco venant des élèves de Poudlard, c'était qu'on lui tienne tête. Les gens qui s'y risquaient auraient pu se compter sur les doigt d'une main. Il y avait bien sûr cet abruti de Potter et ses fidèles suiveurs, mais à part eux.. C'était rare, excessivement rare. Et pas si surprenant que ça ; après tout, il était Draco Malfoy, il avait du pouvoir, de l'influence, quel être sensé s'en prendrait à lui sans craindre de représailles ? Même ces deux crétins de Crabbe et Goyle avaient comprit dès le premier jour où se trouvaient leurs places.

Et pourtant cette fille, April Stanford, s'amusait à lui tenir la jambe au beau milieu de la nuit en l'attaquant sur un sujet pour le moins inattendu. Elle semblait convaincue qu'il traînait derrière lui une ribambelle de femmes qui se pâmaient pour lui, et prêtes à assouvir à la seconde le moindre de ses désirs. En théorie, cela aurait sans doute pu être vrai, si le blond se laissait approcher, et toucher surtout. Mais ça n'était pas le cas. Allez savoir pourquoi, d'ailleurs. Peut-être parce qu'autrefois il était trop jeune et puéril pour s'y intéresser, et que ces dernières années il avait eut d'autres préoccupations bien plus importantes.. Même Pansy Parkinson qui passait aux yeux de beaucoup comme sa petite amie n'était en fait qu'un pantin comme les autres, à la différence près qu'elle avait été la seule, jusque-là, à être un tant soit peu privilégiée.

Légèrement dérouté par les paroles de la jeune femme, Malfoy plissa les yeux, la dévisageant avec suspicion. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien chercher ? Les ennuis ? Un bon coup de poing dans les dents ? Peut-être qu'elle n'était pas en pleine possession de ses moyens, qu'elle ne savait même pas ce qu'elle disait. Si ça se trouve, elle était même somnambule, dis donc.

Pourtant non, elle n'en avait pas l'air, et elle se releva même pour venir se planter devant lui, volontairement provocatrice. Elle était bien plus petite que lui cependant, et il la regardait à présent avec une condescendance affirmée.

Il aurait pu la snober, oui. C'était une des choses qu'il savait faire le mieux, n'est-ce pas ? Mais, peut-être à cause de son état de fatigue avancé, il ne se sentait pas de faire preuve d'une telle patience. Le Draco épuisé est un Draco hargneux. Le Draco hargneux est encore plus chiant que le Draco nature. Quand au Draco nature..

"Parle-moi correctement, Stanford." asséna-t-il donc sèchement, sans pour autant céder à la vulgarité bas de gamme.

Il fallait bien reconnaître pour sa gouverne que, si Draco était un connard, il avait reçut une éducation bourgoise assez stricte. Se tenir droit et ne pas prononcer de mots uniquement dignes du bas-peuple en faisaient notamment partie, mais heureusement pour lui il y avait de nombreuses tournures à l'apparence correcte qui pouvaient se révéler tout aussi mordantes.

"Quel language châtié.. C'est pitoyable." ricana-t-il avec un semblant de sourire en coin. "Qu'est-ce que tu esaies de faire ? Tu aimerais te proposer pour assurer la relève, mais tu veux faire ça de manière originale ? Je peux t'assurer que ce n'est pas la bonne méthode, d'autant que sur ce terrain là, c'est moi qui commande." ajouta-t-il dédaigneusement. Il semblait à mille lieux d'être impressioné par ce dont April l'accusait, du moins était-ce ce qu'il voulait faire croire. Quelque part elle avait pourtant raison, dans un sens comme dans l'autre, mais surtout quand elle disait que cela l'atteignait plus qu'il ne voulait bien le faire croire. Mais un Malfoy restait un Malfoy, et il n'était pas question de donner raison ou de se dévoiler à qui que ce soit. Pourquoi pas la classe éco, pendant qu'on y était ?

"Je suis certain que tu as beaucoup mieux à faire, surtout à une heure pareille. Va donc reposer ta langue de puritaine dans ton lit, ça soulagera tout le monde, et surtout moi."

Une pause. Petit sourire engageur.

"Je n'ai pas l'intention de t'aider à te complaire dans ton trip d'horrible gamine je-sais-tout qui cherche à déverser sa frustration sur tout-un-chacun, très peu pour moi. D'autant plus que, j'en suis certain, si tu étais un peu moins infecte tu trouverai tout un tas de types prêts à te lécher les bottes, voir autre chose. Alors lâches-moi la grappe."

L'héritier Malfoy haussa un sourcil, histoire de bien appuyer ses propos. Si elle croyait pouvoir l'énnerver.. D'ailleurs, pourquoi cherchait-elle à l'énnerver ? Peut-être était-ce vrai, après tout. Elle devait certainement chercher un quelconque geste de sa part. Dommage pour elle, elle n'était pas du tout son genre ; sans compter qu'il n'en avait absolument aucune envie actuellement. Voir jamais, mais ça.

Quel con. S'il se croyait encore dans leurs premières années, où tout le monde se tenait à carreaux parce que l'héritier était dans les parages, la désillusion serait des plus déconcertantes pour lui. April n'avait pas l'intention de faire trop plaisir Sir Malfoy, aussi continuait elle d'afficher un regard sardonique et un sourire en coin. Les bras croisés contre sa poitrine, la Serpentard s'amusait de la manière dont Draco la dévisageait, qui était aussi chiante que drôle. Il aurait du commencer à avoir l'habitude qu'elle trouve toujours le bon moment pour le taquiner, pourtant. Au milieu de la nuit, par exemple. Même si elle n'avait jamais vu une fille pendue au bras de Draco, April ne pouvait pas se faire à l'idée qu'il ne profitait pas de sa réputation afin de combler son ennui. C'était Malfoy après tout. L'incompréhension de son regard s'évapora au profit d'une condescendance déplaisante. La jeune femme grimaça, mais retenue la remarque qui lui chatouillait la langue. Elle ne pouvait quand même pas étoffer la conversation à elle seule, ce n'était pas très divertissant, autrement. Même pour Draco.
D'un geste nerveux, le Serpentard balaya l'air de sa main, et se laissa tomber souplement sur le fauteuil à côté d'elle. « Je te parle comme je veux, Malfoy. » grinça t'elle d'une voix réjouie en insistant sur son nom. Ses manières faussement polie étaient tellement grossière venant de lui qu'April pouffa, son doigt tripotant une mèche de ses cheveux.« Oh, j't'en pris, arrête de faire ta mijorée. On dirais un ogre récitant du Shakespeare. » Derechef, elle grimaça. Alors qu'il parlait, l'intéressée en profita pour détailler le prince, répondant avec des hochements de tête pas vraiment convaincu. April n'était pas certaine que ce soit vraiment lui qui tenait les rênes dans ce cas précis, mais après tout... Relevant la tête vers le blond, elle haussa un sourcil désapprobateur. « Prendre la relève et puis quoi ? J'ai vraiment l'air de te faire des avances ? » Elle eut un sourire qui prit des airs de faux contact, puis son visage redevint parfaitement neutre. Puis soucieux. Puis amusé. Les émotions se combinaient, changeaient les unes après les autres, et finalement, elle adopta un air terriblement contrarié. Ses lèvres se pincèrent, modelant un tirade, puis elle se ravisa. « Pas de bol pour toi, le sommeil m'a oublié depuis pas mal de temps. Et d'ailleurs j'ai pas l'impression d'être la seule à avoir été dénigrée. » Elle répondit à son drôle de sourire par un froncement de sourcils, pour répondre du tac au tac. « Il n'a jamais été question que tu entres dans mon jeu, Malfoy. Et puis pourquoi tu prends le temps de te justifier si t'as autre chose à foutre ? Tu te sens autant concerné que ça par ce que j'ai affirmé ? » Elle prit le temps de laisser les mots s'étirer, puis continua. « Je plaisantais, pourtant. » Minauda t'elle en ronronnant. S'il croyait qu'elle le séduisait, Malfoy se mettait encore une fois le doigt dans l'œil. April n'était pas portée sur les fouines à têtes blondes. Et puis, coucher avec lui n'était peut être plus si valorisant que ça, finalement. Croisant ses jambes en tailleur, signe qu'elle n'en avait absolument pas terminé avec sieur Malfoy, le Serpentard pesa son menton sur sa main replié, accoudé sur son genou, plantant son regard goguenard dans celui de Draco. Se lancer des pics à qui mieux mieux était l'une des seules choses qu'ils savaient faire ensemble, alors autant en profiter convenablement. « Qu'est-ce que tu faisais. » Le visage on ne peut plus sérieux, April s'était laissé poussé par la curiosité, bien qu'elle connaissait parfaitement l'issue de sa question, qui avait prit des allures catégoriques. Mais s'il voulait en finir au plus vite, il fallait bien passer par toute les cases, après tout.

Les accusations de la peste firent mouche. Draco fronça les sourcils en sentant le coin de ses lèvres agité d'un tic incontrôlé. Ca faisait un bon moment qu'un élève de Poudlard avait osé s'opposer à lui de la sorte. A vrai dire, cela s'était surtout produit durant ses deux ou trois premières années ; les Serpentards les plus âgés trouvaient alors dégradant d'obéïr au doigt et à l'oeil de ce petit roi blond et prétentieux qui ne jurait que par son nom et les glorieuses actions de son père. Draco les avait cependant vite remis à leur place, et l'opposition ne se boucula alors plus au portillon, le laissant étaler toute sa suprématie comme il le désirait. Les mots d'un Malfoy pesaient lourd dans la balance, et ils étaient toujours accompagnés de promesses plus ou moins douloureuses si on avait le malheur de lui déplaire. Le pire, c'était sans doute qu'il avait les moyens de les réaliser.

La curiosité de la jeune femme ne lui plaisait apparement pas du tout. Pour qui se prennait-elle, cette petite garce ? En quoi tout cela pouvait-il bien l'intéresser ? Le plus étonnant actuellement était l'expression de Draco, alors que celui-ci retournait ces questions dans sa tête. Il semblait.. perturbé. Destabilisé. C'était la première fois depuis qu'il était entré dans la pièce, mais on percevait nettement un léger éclair paniqué dans son regard, comme si cette raffale de reflexions l'attaquaient intérieurement, à la manière de la Legilimencie. Sauf que le blond était très bon en Occlumencie, et que ça n'avait rien à voir. April avait simplement la langue bien pendue et l'imagination trop fertile ; elle se mâlait de choses qui ne la regardaient absolument pas, et il était de son devoir de le lui rappeller, n'est-ce pas ?

"Fais attention à toi, Stanford.." siffla-t-il donc à voix basse sans cesser de la dévisager alors qu'elle reprenait place dans son fauteuil. "Je veux bien être patient, mais je reste humain, et j'ai mes limites."

Silence. Malfoy renifla avec dédain avant de croiser ses mains dans son dos. Le feu continuait de crépiter dans l'âtre. April le regardait avec des yeux de chats gourmand. Elle donnait vaguement l'impression de se foutre de lui, et pour tout dire, au-dela même du fait d'avoir envie de lui retourner un sort bien placé, Draco se sentait vaguement amusé. Elle se croyait différente. Supérieure, peut-être. Elle pensait sans doute qu'en s'y prenant autrement, pas comme toutes le autres, en faisant l'exact opposé, elle aurait une chance de le faire s'intéresser à elle ; quelle ironie. Même si toutes ces filles l'indifféraient, Draco préféfait quand même largement qu'on l'idolâtre et qu'on se jette à ses pieds. April, April.. Tu ne sers vraiment à rien.

L'ombre d'un léger, très léger sourire apparaît quelque part sur ses lèvres, et Draco relève la tête avec prétention.

"Je n'ai pas grand-chose d'autre à foutre comme tu le dis si bien. Tous les rois doivent à un moment ou à un autre écouter les couinement de leur peuple, n'est-ce pas ? Tu es assez maligne pour t'appercevoir que je ne dors plus, c'est bien, je suis fier de toi. Heureuse ?"

Le sourire s'étire, plus affirmé. Une petite flamme illumine un instant les pupilles de l'adolescent, lui conférant un regard d'illuminé un peu inquiétant.

"Et je ne me sens pas concerné.. Tu ne sais pas de quoi tu parles, et je méprises les gamines dans ton genre. Quand au reste.. Je réfléchissais, figure-toi. A des choses qui te passent largement au-dessus de la tête, que tu as banale, soit dit en passant."

Draco jette un coup d'oeil aux portes des dortoirs, l'air d'hésiter vaguement. Il savait qu'il ne parviendrait pas à dormir avant d'être totalement épuisé. Quelques heures à perdre encore, sans doute. Blaise devait sûrement être en train de ronfler, et il était la seule personne à qui il aurait vraiment aimé parler ; au lieu de ça il se contentait d'April Stanford, comme d'un erzatz aux petites remarques désobligeantes. Sa propre stupidité l'amusa, plus que de le blaser. Mais ça devait être le fruit de la fatigue, rien de plus.

"J'imagine que tu t'occupais toi-même à des activités follement interessantes, mais pas assez pour me valoir en tout cas, apparement. Tu ne devrais pas ainsi sauter sur les gens qui entrent dans la pièce ou tu te trouve déjà, c'est quelque chose qui doit en agacer plus d'un. A moins que ce comportement ne me soit uniquement réserver ? Tu m'honorerais, vraiment. Mais retiens-toi à l'avenir."

» Avertissement pour Draco
» Draco Malefoy ; that's not my fault that i'm so evil it's society, society..